Proposer une solution complète pour couvrir tous les besoins de l’industrie 4.0

Pour Hervé Kostaniak, l’industrie 4.0 n’appartient pas au futur mais au présent ! Et si de nouveaux défis restent à surmonter – à commencer par l’extraction et l’analyse des données de production puis leur exploitation afin d’en améliorer les process –, Sandvik Coromant est aujourd’hui prêt à couvrir toute la chaîne de besoins des industriels grâce à une solution complète.

Hervé Kostaniak, rappelez-nous votre fonction et le rôle du service dont vous dépendez.

J’occupe le poste de directeur technique chez Sandvik Coromant France et suis en charge du portefeuille produits en relation avec notre maison mère en Suède, que ce soit pour les phases de développement ou pour celles de mise sur le marché.

Qu’évoque pour vous l’industrie du futur ?

Le terme « Industrie du futur » me semble de moins en moins adapté, car il renvoie à des notions très lointaines, parfois inatteignables dans l’esprit des entreprises. Or, même si la transition prendra beaucoup de temps, plusieurs sociétés ont déjà initié cette réflexion, cette démarche. Quel que soit le terme utilisé – Industrie 4.0, Digitial manufacturing, Industrie du futur –, la question à se poser est celle-ci : « en quoi cela va-t-il affecter notre travail au quotidien dans le monde de l’usinage et de la production ? ». Dès lors, on relève un changement en profondeur des modes opératoires, lequel impactera tous les maillons de l’industrie depuis la R&D, la conception, la fabrication, la métrologie et la logistique, pour aboutir à un nouveau modèle d’entreprise. L’inter-connectivité des moyens de production tels que la machine-outil, les outils coupants, les robots  de chargement, sans oublier la logistique, permettra de prendre des décisions de manière autonome. L’industrie 4.0 va ainsi offrir la possibilité de dynamiser notre industrie en générant des gains importants de productivité pour une meilleure compétitivité.

Où en sommes-nous aujourd’hui ?

À ce jour, les données technologiques issues de la production, et plus particulièrement l’usinage, sont très peu exploitées. Indéniablement, les « data » issues de la production – et dont on ne se sert pas –sont une source de richesse ! En parvenant à extraire ces données par différents capteurs positionnés sur la machine, mais aussi dans les outils, nous serons à même de les analyser et de créer des modèles capables d’aider l’homme à agir, anticiper et surtout prendre les bonnes décisions avec plus de prévisibilité afin d’éviter que les problèmes n’arrivent. Grâce à des processus toujours plus anticipés et automatisés, les flux opératoires seront accélérés. Dans le jargon de tous les jours, on dit que l’on vit  à 100 à l’heure. Demain ce sera à 200 à l’heure. C’est ainsi.

Il sera ainsi permis de réussir ce que j’appellerai la transition digitale ; celle-ci consistera tout d’abord à enfin passer au « zéro papier » et à s’appuyer sur des modèles 3D fidèles à toute la chaîne de production de la pièce à produire aux outils coupants, aux montages d’usinage, à la machine et à son intégration dans l’atelier afin de suivre les flux. En s’appuyant sur ces modèles, nous allons pouvoir obtenir des process plus fluides, plus rapides, donc plus efficaces.

Quels sont les besoins de vos clients en la matière ?

Les besoins de nos clients, en lien avec l’usinage et l’industrie 4.0, ne vont pas fondamentalement changer ; c’est plutôt notre capacité à répondre à leur demande qui va évoluer. La nécessité d’usiner de manière productive avec des conditions de coupe performante sera toujours présente. L’intérêt majeur pour nos clients se résume à ce que la machine soit occupée à usiner et non soumise à des arrêts. C’est ce que l’on appelle le « Green Light ­Machining » symbolisé par la lampe verte qui reste allumée lorsque la machine fonctionne et produit. Si elle est verte, le client gagne de l’argent ; si elle est rouge, il en perd.

Les raisons des arrêts machines sont multiples. Ils peuvent être dus à l’attente de l’opération précédente, à la maintenance, aux bourrages copeaux ou encore à des processus d’usinage mal maîtrisés qui génèrent des vibrations, des incidents, ou tout simplement à des temps de réglage trop longs à mettre en œuvre ; ce dernier point est d’autant plus important que les tailles des lots que nos clients sont amenés à produire sont de plus en plus réduits. L’industrie 4.0 va permettre de trouver une solution à tous ces problèmes grâce à des systèmes intelligents accompagnés de logiciels performants connectés à la machine et chargés d’augmenter le rendement général de la production. Avec une meilleure gestion des flux, lesquels seront mieux anticipés, les temps d’attente seront fortement réduits.

La sécurité de process est également un élément primordial. L’homme, malgré son intelligence, commet parfois des erreurs en oubliant de serrer un composant, d’inverser les outils ou de ne pas changer à temps la plaquette usée. Pour pallier ces erreurs ou imperfections humaines, les systèmes de surveillance alimentés par les capteurs permettront d’anticiper ces phénomènes perturbateurs.

Comment s’engage Sandvik Coromant dans l’industrie du futur ?

Dans le n°81 d’Équip’Prod paru en octobre, vous avez présenté la suite CoroPlus et les différentes solutions IoT que Sandvik Coromant est aujourd’hui capable de mettre en œuvre pour les industriels ; s’il ne s’agit ici que d’un embryon, l’ensemble de nos solutions montre que nous sommes prêts pour l’industrie 4.0. D’ailleurs, depuis plusieurs années, Sandvik Coromant a énormément investi dans ce domaine pour réussir cette transition digitale. En tant que leader mondial de la coupe, il était fondamental pour nous d’être les pionniers dans le développement des premières solutions d’outils connectés et de logiciels en lien avec l’Industrie 4.0. C’est pour cette raison que nous avons développé le concept CoroPlus.

Pouvez-vous nous expliquer l’intérêt de cette plateforme CoroPlus ?

Bien plus qu’une simple solution d’alésage, CoroPlus est une plateforme de solutions connectées dont le but est de générer plus de valeurs dans l’optimisation des process d’usinage, l’augmentation de la productivité et de la sécurité d’usinage. Tout cela va contribuer à augmenter la rentabilité de la production. CoroPlus va ainsi apporter de la valeur ajoutée dans toutes les phases de la production, et ce à trois niveaux : avant, pendant et après l’usinage.

La phase d’avant usinage couvre la R&D, le bureau d’études, les méthodes, la programmation, sans oublier la logistique. Aujourd’hui, il n’est pas rare de voir que tous ces services fonctionnent en silo, sans réelle communication. L’objectif est de créer un ensemble de fonctions plus connecté, plus efficace et plus rapide utilisant les mêmes standards. Notre offre s’articule autour de deux logiciels. D’une part, la bibliothèque d’outils CoroPlus ToolLibrary ; il s’agit d’un catalogue ouvert de modèles 3D des outils coupants (plaquettes, corps d’outils, allonges, attachements) permettant de créer des assemblés très rapidement, sans redessiner ou rafraîchir les modèles d’origine. Il est possible d’exporter directement ces assemblés vers la FAO et en toute sécurité. Il n’est pas nécessaire de disposer d’une connexion à Internet car CoroPlus ToolLibrary peut fonctionner de manière indépendante, autant hors-ligne qu’en ligne. D’autre part, nous avons le logiciel CoroPlus ToolGuide ; celui-ci permet de définir les vitesses et les avances pour les assemblés d’outils d’un simple clic, sans même quitter le logiciel de FAO. Il préconise également plusieurs choix plus ou moins productifs en fonction de l’application. Cette puissante solution utilise une interface de programmation d’applications (API) afin d’établir la connexion avec le logiciel de FAO. Il est possible, dès aujourd’hui, d’obtenir ­CoroPlus ToolGuide on-line ou off-line depuis notre site Internet ou alors grâce à notre application gratuite Ifind.

Pendant la phase usinage, on va surveiller son déroulement et transférer les données. Cela comprend également des outils équipés de capteurs les rendant intelligents, mais aussi des tableaux de bord pour un réglage à distance. En premier lieu, nous avons développé des solutions destinées à l’usinage intérieur pour lequel, quand l’outil est immergé dans la pièce, il est difficile de voir ce qui se passe. On croise les doigts et on se fie à l’oreille… Il était donc assez évident de porter nos efforts sur les barres antivibratoires Silent Tools lesquelles, en version équipée de capteurs, s’appelleront Silent Tools+. Les adaptateurs antivibratoires connectés améliorent le contrôle et la sécurité des process de tournage intérieur avec de grandes longueurs de porte-à-faux. Le tableau de commande connecté élargit les possibilités de surveillance pendant la coupe, ainsi que celles d’apprentissage et d’optimisation. Il sera par exemple possible de gérer la qualité de l’état de surface, la température du système d’amortissement, le niveau de vibration, l’état des batteries ou l’enregistrement des données d’usinage. Cette solution, basée sur des capteurs, offre un accès direct aux informations sur ce qui se passe à l’intérieur des machines et au niveau de la pièce afin de faciliter les actions de prévention et l’amélioration des process.

Les outils d’alésage CoroBore+ permettent, quant à eux, un réglage à distance du diamètre des outils d’alésage micrométrique et, ainsi, un montage plus rapide et plus facile. Le système intégré aux outils offre la possibilité d’en régler le diamètre à distance et de manière automatique, sans fil ni accessoires, à travers des interfaces logicielles. Les outils montés sur une machine ou sur un banc de préréglage peuvent ainsi être réglés avec précision pour l’alésage micrométrique.

La troisième solution se nomme Promos 3+ ; celle-ci permet une surveillance en temps réel de l’usinage en toute sécurité et de parer aux surcharges intempestives, aux bris d’outils ou à tout autre événement soudain. Promos 3+ est une solution développée par un des leaders allemands de la surveillance en usinage Prometec dont Sandvik Coromant a fait l’acquisition. Avec plus de trente ans d’expérience dans le domaine, Prometec compte plus de 15 000 installations dans le monde.

Enfin, vient la troisième partie de l’offre CoroPlus, correspondant à la phase  « après usinage » ; j’appellerai celle-ci « l’usinage analytique avancé », lequel consiste à capturer toutes les données générées par les outils connectés et différents logiciels afin d’optimiser les process, que ce soit au niveau de la machine, de la cellule de production, de l’atelier ou de l’usine entière. C’est ce que l’on pourrait résumer et analyser comme cercle vertueux de l’industrie 4.0.

Pouvez-vous nous présenter les avantages pour les opérateurs ?

Ces nouvelles technologies vont faciliter la vie de l’opérateur dans la mesure où il pourra désormais s’appuyer sur différents moniteurs de contrôle qui l’informeront du comportement de l’usinage en temps réel. Il aura moins d’intervention à réaliser dans la machine grâce aux réglages des outils à distance. Les puces RFID lui permettront de localiser plus facilement, dans l’atelier, les outillages et les pièces dont il aura besoin, limitant ainsi les temps de recherche non productifs.

Les logiciels CoroPlus Toolguide et Tool ­library sont aujourd’hui déjà présents sur le marché ;  quant aux outils CoroPlus Silent Tools, CoroBore + et Promos 3+, ils seront disponibles à la vente en fin d’année 2017. D’ici 2018, d’autres solutions verront le jour, répondant toujours au maximum aux problématiques des industriels dans le domaine de l’industrie 4.0.

N° 82 Novembre 2016